Tous ensemble avec les catholiques, oui !
Redisons-le avec Escada, Maugendre, Antony et beaucoup d’autres : que des homosexuels, des incroyants, des gauchistes, des musulmans, etc., défilent politiquement avec nous le 13 janvier pour retirer le projet de loi révolutionnaire sur le « mariage » gay ne nous gêne aucunement. Au contraire. Pourquoi ? C’est tout en étant et restant nous-mêmes, en catholiques et en tant que catholiques, que nous entrons dans ce combat temporel, dans ce « collectif » contre la dénaturation du mariage. Une bataille défensive et de maintenance que nous inspirons et menons même d’une certaine manière (quantitativement et qualitativement) avec tous ces alliés de bonne volonté. Une mobilisation qui a, pour tous en somme, la loi (morale) naturelle comme motif et, pour les fils missionnaires de l’Eglise, la loi surnaturelle comme finalité suprême.
Malgré ses problèmes de porte-parole (cf. l’article de Jeanne Smits hier), cette mobilisation offre une nouveauté dans la visibilité et le paysage politiques des catholiques. Peut-être plus encore : une révolution copernicienne dans la stratégie qui leur était jusque-là suggérée par les évêques. Laquelle stratégie, sous prétexte d’ouverture au monde, consistait à se rallier le plus souvent au fameux « pas d’ennemi à gauche ». C’est-à-dire à s’enfouir clandestinement et s’effacer anonymement dans la logique et les principes sécularistes de l’adversaire, avec sa praxis dialectique et son système droite-gauche comme ligne de démarcation du nouvel ordre moral. Aboutissant toujours à exclure finalement le prétendu extrémisme-de-droitedésigné par cette axiologie mouvante de pacotille, c’est-à-dire l’intégriste et le facho ! Excommuniés du pacte et du Panthéon républicains…
Depuis trop longtemps, en effet, pour mener le combat politique dans cet univers démocratique de la laïcité à la française, les catholiques ne devaient s’allier aux libéraux, aux incroyants, aux gauchistes, etc., qu’en se faisant plus ou moins libéraux, agnostiques, gauchistes, etc. Bref en se dissolvant plus ou moins dans une infusion naturaliste, en se cantonnant presque exclusivement dans l’argument ad hominem (cf. Présent du 1er décembre). S’ils devaient manifester pour leurs idées, c’était nécessairement dans des manifs a-confessionnelles et même a-politiques, refoulant les présumés « extrémistes » toujours accusés de « récupération ». On se rappelle les mots d’ordre de 1984 pour la liberté de l’enseignement. On n’a pas oublié non plus l’anathème de Mgr Gilson contre les militants catholiques provie : « Ils ont le droit de manifester, mais pas en utilisant (…) la violence que représentent leurs chapelets brandis… Il y a perversion des moyens, ils ne doivent pas agir ainsi. (…) Ils se trompent en utilisant prières et cantiques pour faire entendre leurs cris. »
Il y a bien encore de ce refrain-là dans l’air que nous chante Frigide Barjot. Mais les temps changent. Et c’est sans état d’âme que nous passerons outre ces velléités médiatiquement correctes. Car ce sont des évêques eux-mêmes qui descendent maintenant « crier » dans la rue, en réalisant et incarnant le fait que la prière et le « cri » – si dédaigné jusque-là par Mgr Vingt-Trois… lorsqu’il était confessionnel ! – ne sont pas incompatibles pour un catholique digne de ce nom. Debout les évêques !
En tant que catholiques !
On pourrait alors progressivement assister à une bienheureuse substitution du « pas d’ennemi à gauche » par un « pas d’ennemi à droite » bien compris, qu’il ne faut surtout pas interpréter comme une inversion de la praxis gauchiste, selon l’éclairage qu’en a donné Jean Madiran dans La République du Panthéon (DMM). Pas plus que la contre-révolution est une révolution contraire mais le contraire de la révolution. Notre positionnement politique de catholiques doit se faire désormais sur la base de la loi (morale) naturelle, par rapport notamment à cette ligne de démarcation qu’opèrent les principes non négociables face à des lois de rupture comme l’« IVG » ou le « mariage » homo. Non par rapport à cette ligne de démarcation mythique qui passe « démocratiquement » entre gauche et droite, dans un faux équilibre entre progressistes et conservateurs…
Refusant cet impératif catégorique de la politique imposé par la gauche depuis la Révolution, nous ne sommes ni de droite ni de gauche, mais d’ailleurs ou de partout : à droite de l’extrême droite ou au centre de la tradition française ! Nous voulons coopérer intelligemment avec tous ceux qui se rapprochent de la loi naturelle et se raccrochent à elle, de près ou de loin, comme centre de gravité de la tradition française : celle de la fille aînée de l’Eglise qui a fait alliance avec la sagesse éternelle. N’en déplaise à Frigide, l’« extrémiste de droite », selon la terminologie gauchiste d’hier, peut et doit devenir le compagnon de route du catholique. Comme l’homosexuel de Plus gay sans mariage ou le chrétien de gauche de Poissons roses. S’ils se situent positivement par rapport à la loi naturelle et au bien commun national. Pas d’ennemis dans ce sens-là qui est le contraire de la gauche ! Notre coalition politique avec d’autres familles intellectuelles et communautés religieuses doit se faire en restant ouvertement catholique au nom de la doctrine sociale de l’Eglise, précisant au besoin en quoi certaines revendications secondaires de nos coalisés ne sont pas catholiques ni donc tout à fait raisonnables. L’essentiel étant qu’avec l’amitié politique des catholiques, la communion des saints et des pécheurs, même nos misères redeviennent chrétiennes, comme disait Péguy, car cela est « matière à la grâce ».
Certes, ce sont des restes de la loi naturelle que nous sauvegardons aujourd’hui. Comme il est dit dans l’Apocalypse (III, 2) : « Sois vigilant et maintiens les restes qui allaient périr. »Mais, c’est à partir de la réalité de ces restes que, tous ensemble, dans cette nouvelle dynamique où les catholiques redeviennent présents comme un vrai levain dans la pâte (par leur identité, leur communauté et leur mission), que nous pourrons peut-être, si Dieu le veut, faire renaître notre civilisation en état de mort clinique. Ne manquons donc pas ce « rendez-vous historique » du 13 janvier, comme dit Mgr Centène. Avec ce slogan salutaire qui a changé de sens et peut tout changer : « Tous ensemble, tous ensemble avec les catholiques, oui, oui, oui ! »
REMI FONTAINE
Source : Présent